Le bail rural : les règles particulières (durée, loyers, droits et obligations)
Le bail rural permet à un agriculteur d’exploiter un bien agricole tout en garantissant au propriétaire une exploitation encadrée et des revenus stables. Ce contrat de location peut porter sur des terres des bâtiments agricoles et des bâtiments d’habitations. Encadré par le statut du fermage, ce contrat impose des règles spécifiques applicables à toutes les parties.
La durée et le renouvellement du bail rural
Le bail rural doit avoir une durée minimale de 9 ans.
Le preneur du bail rural bénéficie d’un droit au renouvellement, cela signifie qu’une fois qu’il arrive à son terme, le bail se renouvelle pour une nouvelle période de 9 ans, sans aucune démarche particulière.
Exceptions :
- Le bailleur peut s’opposer au renouvellement dans des cas strictement définis par la loi (non-paiement des loyers, reprise pour exploitation familiale, etc.).
- Le preneur peut renoncer au renouvellement en notifiant le bailleur au moins 18 mois avant la fin du bail.
Le calcul du fermage (loyer)
Contrairement aux baux d’habitation ou commerciaux, les cocontractants ne peuvent fixer librement le montant du fermage des terres et des bâtiments d’exploitation ou le loyer des bâtiments d’habitation.
Le calcul du fermage est encadré par des arrêtés préfectoraux départementaux qui définissent des seuils minimum et maximum à respecter. Son montant dépend de :
- la durée du bail,
- l’état des bâtiments,
- la qualité des sols,
- ou encore la structure parcellaire du fonds.
Chaque année le fermage des terres et des bâtiments d’exploitation sera actualisé sur la base de l’indice national des fermages (INF). Pour les bâtiments d’habitation, c’est sur la base de l’indice de référence des loyers (IRL) que le loyer peut être actualisé.
Les droits et obligations du preneur
Au travers du bail rural et des règles du statut du fermage, le preneur bénéficie de droits et doit respecter d’un ensemble d’obligations :

Attention, une partie de ces droits sont strictement encadrés et peuvent nécessiter l’information voir l’autorisation du bailleur. De plus, le non-respect de ces obligations peut entraîner le versement de dommages et intérêts, et parfois même la résiliation du bail.
Les droits et obligations du bailleur
En plus de pouvoir résilier judiciairement le bail rural pour faute du preneur ou s’opposer à son renouvellement dans certains cas précis, le bailleur dispose de droits et est tenu par un ensemble d’obligations :

Des règles d'ordre public
Les règles du statut du fermage sont d’ordre public, cela signifie qu’elles s’appliquent automatiquement et que l’on ne peut pas les éviter grâce à une clause dans le bail !
Quand faire un bail rural ?
En principe, le bail rural et les règles du statut du fermage s’appliquent obligatoirement dans toute location d’un bien agricole dans le but d’y exercer une activité agricole.
Quand s'applique le bail rural ?
- Un bien agricole (terres, bâtiments) est mis à disposition.
- Une activité agricole conforme à l’article L.311-1 du code rural est exercée.
- Une contrepartie financière ou en nature est versée (fermage).
Le bail rural est donc le contrat obligatoire pour louer un bien immobilier agricole à un agriculteur en vue de l’exercice d’une activité agricole.
Qu’est-ce qu’une activité agricole du point de vue du droit ?
Le bail rural concerne la location d’un bien dont l’usage est principalement agricole, avec pour objectif que le preneur l’exploite dans le cadre d’une activité agricole reconnue par l’article L.311-1 du Code rural et de la pêche maritime. Pour bénéficier du statut du fermage et des dispositions applicables au bail rural, l’activité du preneur doit relever d’une des catégories suivantes :
Activités liées à un cycle biologique végétal ou animal :
Elles impliquent la maîtrise et l’exploitation de cycles biologiques, comme :
- Le maraîchage,
- La production de céréales (blé, maïs, etc.),
- L’élevage (bovin, caprin, ovin, etc.).
Activités en prolongement de la production agricole :
Ces activités complètent directement l’acte de production en intégrant des étapes suivantes, comme :
- La transformation des produits agricoles (fabrication de fromages, jus de fruits, etc.),
- Le conditionnement et la commercialisation des produits issus de l’exploitation (vente à la ferme ou circuits courts).
Activités ayant l’exploitation agricole comme support :
Certaines activités reposent sur la valorisation du cadre agricole pour proposer des services ou expériences, par exemple :
- L’hébergement touristique (gîtes ruraux),
- La restauration (tables d’hôtes),
- L’accueil éducatif ou pédagogique (fermes pédagogiques).
Activités agricoles reconnues par la loi :
Enfin, certaines activités, bien qu'éloignées de la production agricole traditionnelle, sont expressément reconnues comme agricoles par la loi. Parmi celles-ci figurent notamment la production de biogaz.
Pour plus de précision sur les différentes définitions de l’activité agricole (fiscale, juridique et sociale) et les enjeux pour les activités accessoires vous pouvez dès à présent consulter notre article sur la Transformation des matières premières à la ferme.
Les différents types de baux ruraux
En complément du bail rural “classique” de 9 ans, qui suit les règles générales exposées, il existe plusieurs types de baux ruraux à long terme. Chacun bénéficie de règles spécifiques qui peuvent parfois déroger à certaines règles habituelles du statut du fermage.
Le preneur et le bailleur ont la possibilité de choisir parmi ces différentes options :
- Le bail rural de 9 années ou plus (bail rural “classique”),
- Le bail rural de 18 ans ou plus,
- Le bail rural de 25 ans,
- Le bail de carrière, qui couvre la durée de la vie professionnelle du preneur,
- Le bail cessible hors du cadre familial (minimum 18 ans), permettant une cession à un tiers non apparenté.
Chaque type de bail s'accompagne d’avantages et de règles spécifiques, répondant à des besoins variés selon les situations des parties contractantes.
Tableau comparatif des différents types de baux ruraux

*IFI : Impôt sur la fortune immobilière
Comment choisir son bail rural ?
Le choix du type de bail rural repose sur une analyse des besoins et des objectifs spécifiques du preneur et du bailleur. Chaque type de contrat offre des avantages et des contraintes qu’il est essentiel de prendre en compte pour sélectionner la formule la plus adaptée.
Avantages des baux ruraux à long terme
Les baux de longue durée (18 ans ou plus, 25 ans, de carrière, cessible) font bénéficier au bailleur d’avantages fiscaux et économiques :
- Une exonération partielle des droits de donation et de succession,
- Une exonération partielle ou total de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI),
- Un fermage (loyer) plus élevé.
De plus, la rédaction par un notaire (obligatoire pour un bail de plus de 12 ans) apporte une sécurité juridique accrue (date certaine, force exécutoire, qualité du contrat etc.).
En contrepartie, le preneur profite d’une durée de bail beaucoup plus longue et une grande stabilité.
Cependant, la rédaction par un notaire implique des coûts supplémentaires et des délais plus longs. De même, lorsque le contrat nécessite une modification (entrée ou sortie d’un copreneur, ajout d’une parcelle, etc.), le passage chez le notaire est à nouveau nécessaire !
Avantages du bail rural de 9 ans
Le bail rural de 9 ans ou plus (durée inférieure à 12 ans) est une option mieux adaptée aux situations moins complexes et aux budgets plus modestes.
- Flexibilité : Ce type de contrat est idéal pour les opérations peu complexes avec de possibles modifications à venir.
- Coûts réduits : La rédaction par un notaire n’est pas obligatoire, ce qui limite les frais initiaux.
- Modification facilitée : En cas de besoin (ajout ou retrait d’un copreneur, intégration d’une nouvelle parcelle, modification du loyer), les démarches sont simplifiées.
Cependant, en l’absence de rédaction notariale, la sécurité juridique peut être moindre. C’est pourquoi, il est fortement recommandé de faire appel à un avocat spécialisé pour la rédaction de votre contrat de location. Pour rédiger un bail rural simplement par vous-même, vous pouvez également utiliser la plateforme GASTON.
Critère pour bien choisir
Il est essentiel de prendre en compte les objectifs et les attentes du preneur et du bailleur pour sélectionner le contrat de bail le plus approprié à leur situation spécifique :
- Objectifs fiscaux et patrimoniaux : Si le bailleur cherche à optimiser sa fiscalité ou à transmettre son patrimoine, un bail à long terme sera souvent préférable.
- Budget et complexité : Pour des situations plus simples et des budgets restreints, un bail classique de moins de 12 ans est souvent suffisant.
- Durée souhaitée : Les preneurs souhaitant sécuriser leur exploitation sur le long terme privilégieront un bail de longue durée.
En résumé, le choix du bail rural doit être guidé par une réflexion approfondie sur les attentes respectives des parties et sur les contraintes légales ou financières associées. Adapter le type de bail à ces paramètres permettra d’assurer un équilibre optimal entre souplesse, rentabilité, et sécurité.
Comment faire un bail rural ?
Le bailleur et le preneur, à condition de respecter les règles du statut du fermage, disposent d’une certaine liberté dans le choix de la forme à donner au bail rural. Effectivement, celui-ci pourra être écrit ou verbal, sous seing privé (acte sous signature privée) ou notarié, en recourant à un professionnel du droit ou pas.
Qui peut faire un bail rural ?
Pour ce qui est du preneur, n’importe quel citoyen français ou européen peut prétendre conclure un bail rural à l’exception des mineurs non émancipés et des majeurs sous tutelle (sauf intervention du représentant légal). Attention, il faudra s’assurer que le preneur soit bien en règle avec le contrôle des structures, au risque de voir le bail rural invalidé.
Le Bailleur peut être :
- L’unique propriétaire bien,
- L'usufruitier avec l’accord du nu-propriétaire ou du juge civil,
- Un indivisaire mandaté ou ayant l’accord de l’ensemble des indivisaires.
Le preneur comme le bailleur peuvent être une personne morale (société, association, etc.), à condition que le bail soit signé par l’un de ses représentants légaux.
Faut-il faire un état des lieux ?
L’absence d’état des lieux ne remet pas en cause la validité du bail rural. Toutefois, il est très fortement recommandé de réaliser un état des lieux des terres et des différents bâtiments mis à bail afin de protéger le bailleur et le preneur.
Le bail doit-il être écrit ?
En principe, le bail rural doit être écrit, bien qu’il puisse aussi être verbal. Dans le cas d’un bail verbal, ce sont les clauses du contrat-type départemental qui s’appliqueront.
Afin de sécuriser les cocontractants et de réaliser un bail rural adapté à la situation, il est vivement recommandé de conclure un bail rural écrit.
Faut-il un professionnel du droit ?
Centre de gestion, avocat ou notaire, différents professionnels du droit ont la possibilité de rédiger un bail rural. La rédaction chez un professionnel du droit permet de bénéficier d’un contrat qualitatif et adapté aux situations complexes. Par exemple, pour un bail rural de 9 ans, des avocats spécialistes du droit rural seront compétents pour vous accompagner et rédiger votre contrat. Cependant, le recours à ces professionnels implique une contrepartie et des délais plus ou moins importants.
Il est également possible de rédiger soi-même son contrat à partir d’un modèle de bail rural type.
Où trouver un modèle ?
Des modèles de bail rural gratuit sont proposés par différents sites internet. Cependant, il est difficile d’avoir des garanties sur la qualité du contrat et la légalité des clauses incluses.
La plateforme GASTON vous offre la possibilité de rédiger vous-même votre bail rural en toute simplicité grâce à son générateur de contrat. Avec un modèle de bail rural rédigé par des avocats spécialisés en droit rural, le générateur vous permet d’éditer votre propre bail rural à partir d’un questionnaire simple et intuitif et d’obtenir un contrat en règles et adapté à votre situation.
Comment mettre fin au bail rural ?
La résiliation d’un bail rural est encadrée par le statut du fermage, permettant au bailleur comme au preneur de mettre fin au contrat dans des cas spécifiques, sous réserve de respecter les conditions légales prévues.
La résiliation par le Bailleur
Le bailleur peut résilier un bail rural pour les raisons suivantes :
Faute du preneur. La résiliation peut être demandée auprès du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux (TPBR) en cas de :
- Non-paiement répété des loyers.
- Manquement aux clauses environnementales.
- Agissements compromettant l’exploitation du fonds.
- Cession illicite du bail.
Droit de reprise. Le bailleur peut récupérer les terres pour :
- Une exploitation personnelle ou familiale (descendants, conjoint, partenaire pacsé).
- Construire une maison ou une dépendance foncière sur une partie du bien.
Opposition au renouvellement. À la fin du bail, le bailleur peut refuser son renouvellement pour les motifs cités précédemment ou si le preneur atteint l’âge de la retraite.
Résiliation par le Preneur
Le preneur peut demander mettre fin au bail rural en cours sans passer par la voie judiciaire pour les motifs suivants :
- Une incapacité au travail grave et de plus de 2 ans du preneur,
- le décès ou une incapacité d’un membre de sa famille (grave et de plus de 2 ans) qui est indispensable au travail de la ferme,
- L’acquisition d’une ferme qu’il souhaite exploiter lui-même,
- Le refus d’autorisation d’exploiter par la préfecture (DDT ou DDTM).
Il dispose également de la possibilité de s’opposer au renouvellement du bail une fois celui-ci arrivé à son terme.
La résiliation amiable du bail rural
Enfin, il est possible que l’ensemble des cocontractants du bail rural soient d’accord pour y mettre fin. Dans ce cas, un acte de résiliation amiable du bail rural devra être signé par le bailleur et le preneur.
Attention, la résiliation d’un bail rural est une opération complexe et peut requérir l’accompagnement d’un professionnel du droit.
Quels sont les avantages du bail rural ?
Pour le preneur, souvent un agriculteur, le bail rural soumis au statut du fermage lui permet de sécuriser son exploitation dans le temps à condition d’assurer une bonne exploitation du fonds, de payer ses fermages et de respecter les clauses du bail.
Pour le bailleur, le bail rural permet de s'assurer que son bien est exploité et entretenu tout en bénéficiant d’avantages économiques (fermages) et fiscaux (cf. baux à long terme).
Peut-on choisir un autre contrat de location que le bail rural ?
En principe, il n’est pas possible d’avoir recours à un autre contrat que le bail rural pour louer des biens immobiliers ruraux afin d’y faire exercer une activité agricole. Cependant, louer un bien immobilier agricole en attendant d’installer son enfant, louer un fonds d’une petite surface, ou encore louer son bien à la SAFER font partie des situations qui permettent de recourir exceptionnellement à d’autres contrats de location que la bail rural :
Bail d’un an renouvelable en attendant l’installation d’un descendant du bailleur
En attendant l'installation de l’un de ses descendants qui ne dispose pas encore de la capacité nécessaire pour exploiter, un propriétaire peut décider de recourir à une location annuelle renouvelable.
Bail sur une “petite parcelle”
Si le bail porte sur une surface inférieure au seuil de petite parcelle établi par arrêté préfectoral, alors il est partiellement dérogatoire au statut du fermage (prix et durée librement fixés, pas de droit au renouvellement ni de droit de préemption du preneur).
Pour résumer
- Le bail rural est le contrat qui permet au propriétaire d’un bien agricole de le mettre à disposition d’un agriculteur afin que celui-ci l’exploite. En échange, une contrepartie (pécuniaire ou autre) sera versée au propriétaire.
- Le bail rural est soumis aux règles particulières du statut du fermage.
- En plus du bail rural “classique” de 9 ans, différents types de baux ruraux à long terme bénéficient de règles particulières et d’avantages fiscaux pour le bailleur.
- Le bail rural peut être écrit ou verbal, bien qu’il soit recommandé de lui donner une forme écrite.
- Il est recommandé de rédiger son bail rural avec un professionnel du droit ou avec l’aide de la plateforme GASTON et de son générateur de contrat.
Questions-réponses
Existe-t-il un contrat particulier de location de terrains agricoles ? Un bail agricole ?
Oui. Il s’agit du bail rural, qu’un bailleur (propriétaire) va utiliser pour louer un bien agricole à un exploitant agricole locataire (preneur). Le bien agricole peut être un ensemble de terrains agricoles et/ou de bâtiments agricoles et d’habitation.
Le bail rural doit-il être écrit ? Peut-on faire un bail verbal agricole ?
Bien qu’il soit préférable que le bail rural prenne une forme écrite, il peut également être verbal lorsque sa durée est de 9 ans (ou inférieure à 12 ans).
Une autorisation d'exploiter est-elle nécessaire afin de signer un bail rural ?
Afin de conclure un bail rural, l’exploitant-preneur doit être en conformité avec le contrôle des structures. Il convient de se renseigner auprès des services de la DDT ou DDTM afin de savoir quel régime s’applique pour votre situation (autorisation d’exploiter, déclaration préalable, …).
Comment fixer le prix de location d’un terrain agricole ?
Fixer le prix de location d’un terrain agricole dans le cadre d’un bail rural, requiert de connaître et suivre les règles applicables dans votre département. Chaque département bénéficie d’un ou de plusieurs arrêtés préfectoraux départementaux qui fixent les règles de calcul du prix du fermage. Vous trouverez tous les détails nécessaires dans l’article suivant : “Calculer le fermage d’un bail rural ?”.
Qu’est-ce qu’un bail rural environnemental ?
Le bail rural environnemental est un bail rural classique mais comportant en plus des clauses environnementales. Pour plus d’informations, consulter l’article suivant : Le bail rural environnemental.
Sources
L. 311-1 du CRPM pour la définition de l’activité agricole
L. 411-1 et suivants du CRPM pour les règles applicables aux baux ruraux (statut du fermage)
L. 416-1 et suivants du CRPM pour les règles particulières applicables aux baux ruraux à long terme
L. 418-1 et suivants du CRPM pour les règles particulières applicables aux baux cessibles hors du cadre familial